J’ai connu l’enfer avec la bouffe (Ouest-France 28/02/2012)

« J’ai connu l’enfer avec la bouffe »

Ce soir, comme tous les mardis, les Anorexiques et boulimiques anonymes se retrouvent à la Manufacture à Nantes. Ils s’entraident pour se sortir de la maladie. L’un d’eux témoigne.

Hervé (1), 41 ans, a crée le groupe des Anorexiques et boulimiques anonymes de Nantes.

« Tout c’est déclenché à 14 ans. Mes relations étaient très difficiles avec mes parents. J’ai ressenti énormément de tristesse à cet âge-là, la mort me faisait peur, je me suis renfermé, je ne mangeais plus, ma croissance s’est bloquée. Mes parents m’ont hospitalisé. J’ai pris peur et je me suis mis à manger beaucoup. Petit a petit, j’ai découvert que les vomissements me mettaient en état de grâce et je suis tombé dans la bouffe comme dans la came dure. Mon estomac pouvaient contenir jusqu’à 5 litres de nourriture. Je volais pour manger. J’étais rebelle, violent, je n’arrivais pas à m’en sortir. La boulimie c’est la maladie de la honte, on crève de nos secrets.
A 25 ans, je mangeais, je vomissais jusqu’à trouver le shoot idéal. J’ai vécu des années comme cela. C’est grâce à mon meilleur ami que j’ai pu rencontrer, à Saint Brieuc, des membres des Anorexiques et boulimiques anonymes. Avec eux, j’ai trouvé les miens. J’ai été accueilli et pas jugé. On m’a dit « Essaye » au lieu de « Il faut », ça change tout. Avec deux autres personnes, nous avons ensuite crée le groupe de Nantes.
Depuis octobre 2007, je suis « sobre », j’ai un rapport apaisé avec la nourriture. J’ai fait mon chemin, épaulé par ceux du groupe nantais que je peux appeler librement. Parfois, il m’arrivait de laisser une miette de côté. Cela peut paraître ridicule peut être mais j’avais réussi à ne pas la manger… On m’a toujours encouragé.
Aujourd’hui, je me sens bien mais fatigué. J’ai une maison, je suis salarié dans une entreprise de transports routiers. Et je voudrais surtout dire qu’on peut redevenir libre, qu’on peut se sortir de la nourriture défonce.