TEMOIGNAGE D’ALICIA (février 2019)

Longtemps, j’ai cru qu’il me suffirait d’être mince pour être heureuse. Si je n’avais jamais été heureuse, c’était parce que je n’étais pas assez désirable. J’étais convaincue qu’une fois que j’aurais un corps parfait, un bon job, un compagnon intéressant, qu’alors tout irait bien.

Je me suis toujours comparée aux autres membres de ma famille, à mes amis. J’étais le vilain petit canard.

A partir de mes huit ans, âge où j’ai commencé à avoir conscience de l’image que je renvoyais aux autres, j’ai oscillé entre des périodes courtes mais spectaculaires -en termes de perte de poids- de restrictions alimentaires suivies de périodes beaucoup plus longues, où je mangeais sans pouvoir m’arrêter. Ces dernières pouvaient durer des mois sans que je ne trouve l’énergie de me mettre au régime, de faire du sport ou bien seulement de sortir de chez moi. Ces périodes d’intense déprime, de frustration et de résignation s’accompagnaient de prises de poids un peu plus importantes à chaque fois. Plus je mangeais et moins je pouvais m’arrêter.

Le matin, je me levais avec un écœurement, et j’étais heureuse car je n’avais pas envie de manger, puis mes crises commençaient en milieu d’après-midi, accompagnées du désespoir de ne pas arriver à les contrôler. Dès que j’avais faim, j’entrais en crise, généralement vers 15 ou 16h et je ne m’arrêtais de manger qu’après quelques heures.

C’était toujours le même schéma : après plusieurs mois à remplir mon corps de nourriture et de sodas, d’un coup, d’un seul, je ressentais l’urgence de mincir et de violenter mon corps afin de rentrer dans les critères de beauté auxquels j’estimais ne pas correspondre. Après quelques semaines de séances acharnées de sport, je commençais alors à perdre du poids et à ce moment-là, je reprenais une vie sociale intense, épuisante. Comme si je devais d’un seul coup rattraper les mois où je n’avais pas eu la force de sortir. Pendant ces périodes, je ne m’alimentais presque plus. Mes repas étaient liquides. Je passais du tout au rien.

Quand j’allais au restaurant avec des amis, j’avais tellement peur de trop manger en public que je me disais que j’allais manger un peu avant de partir. Neuf fois sur dix, j’étais incapable de m’arrêter et cette petite collation se transformait en crise de boulimie.

J’ai connu pendant vingt-cinq ans la restriction alimentaire et le gavage en alternance.

Et puis un jour, je me suis rendue compte que j’avais tout ce que j’avais toujours désiré : le compagnon tant attendu, le corps mince dont je rêvais, le job qui payait bien. Et pourtant, je souffrais, j’étais misérable et mal-aimée. C’est à ce moment que j’ai poussé la porte des ABA.

Aujourd’hui, je ne fais plus de crise. Je peux m’alimenter en public sans culpabiliser. Je ne m’inflige plus de souffrance avec la nourriture. J’apprends à apprécier la vie que j’ai. Je ne grossis plus. Je ne mincis plus. Je commence à goûter à une vie qui ne tourne plus autour de ce que je mange ou de ce que je ne mange pas et surtout je peux me regarder dans le miroir avec bienveillance.

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